Une étude ne prouve pas l’efficacité d’un programme de kinésithérapie de un an sur des indicateurs de dépression chez des personnes âgées de plus de 65 ans vivant en maison de retraite.
Un essai randomisé contrôlé d’Underwood et collaborateurs publié dans la revue The Lancet en 2013 teste les bénéfices d’un programme bihebdomadaire de kinésithérapie sur des marqueurs dépressifs de personnes de plus de 65 ans vivant en résidence spécialisée. Le protocole compare 398 personnes ayant suivi le programme durant un an à 493 personnes ne l’ayant pas suivi. Le programme consiste à réaliser deux séances supervisées de kinésithérapie en groupe par semaine, plus un encouragement à la pratique d’activité physique au quotidien. L’étude ne prouve pas l’efficacité du programme de kinésithérapie après un an sur les indicateurs de dépression. Aucun incident grave n’a été constaté au cours des séances de kinésithérapie.
Le détail
Le rationnel de l’étude
Les personnes âgées de plus de 65 ans vivant en maison de retraite souffrent souvent de dépression ou présentent des symptômes dépressifs. Ces troubles accroissent leur fragilité et le risque de décès. Une pratique d’activité physique deux fois pas semaine supervisée par un kinésithérapeute pourrait enrayer ces signes de dépression, c’est ce que tente de prouver cette étude.
La question posée
Un programme de kinésithérapie peut-il diminuer l’apparition ou l’intensité de symptômes dépressifs chez des personnes de plus de 65 ans vivant en maison de retraite?
Le protocole
Un essai randomisé contrôlé britannique publié dans la revue The Lancet en 2013 teste les bénéfices d’un programme bihebdomadaire de kinésithérapie sur des marqueurs dépressifs de personnes de plus de 65 ans vivant en résidence spécialisée. Le protocole compare 398 résidents ayant suivi le programme à 493 résidents ne l’ayant pas suivi. L’âge moyen des participants est de 86,5 ans, dont 76% de femmes. Le programme consiste à suivre deux séances par semaine, collectives et par un kinésithérapeute (séance de 45 minutes, exercice d’intensité moyenne, aérobie et résistance, en position assise ou debout, avec ou sans musique), plus un encouragement à la pratique au quotidien. Les deux groupes bénéficiaient également d’une information sur l’identification des signes de dépression et sur les conduites à tenir pour y faire face.
Les résultats principaux
Aucune différence n’est obtenue entre les groupes après un an de pratique sur les indicateurs de dépression étudiés (GDS-15, MMSE, peur de chuter, consommation d’antidépresseur, nombre de consultation pour raison de souffrance psychologique ou nombre de décès). L’étude ne prouve pas l’efficacité de programme de kinésithérapie sur les marqueurs de dépression. Aucun incident grave n’a été constaté au cours des 3191 séances proposées.
Le message pour les seniors
Il n’y a pas eu d’effet du programme bihebdomadaire de kinésithérapie sur les marqueurs dépressifs de personnes vivant en maison de retraite âgées de plus de 65 ans. Il semble manifestement que la pratique quotidienne d’activité physique n’ait pas augmenté malgré les deux séances hebdomadaires en plus. La dose d’activité physique ne semble pas avoir changé, et donc n’a pas pu être bénéfique pour réduire les indicateurs de dépression.
Le message pour les professionnels
Ce programme de kinésithérapie n’est pas efficace sur les marqueurs dépressifs au bout d’un an. Les auteurs de l’étude regrettent que trop d’exercice ait eu lieu en position assise et à une intensité trop faible. Par ailleurs, le fait de proposer des séances nouvelles de kinésithérapie peut faire paradoxalement baisser la dose hebdomadaire d’activités physiques. En cause, la fatigue, le fait de penser avoir réalisé suffisamment d’exercice… Il faut donc veiller à ce que cela n’arrive pas.
Le message pour les chercheurs
programme de kinésithérapie n’est pas efficace sur les marqueurs dépressifs après un an. Les auteurs regrettent que trop d’exercice ait eu lieu en position assise et à une intensité trop faible. Cela ouvre la porte à de nouvelles recherches en kinésithérapie comme en activités physiques adaptées (APA) pour à la fois rendre les exercices plus vigoureux, ludiques et socialisants et encourager à faire plus d’activité physique au quotidien.
Le message pour les décideurs
L’étude invite à se pencher précisément sur le contenu des séances d’exercice physique et sur les stratégies d’encouragement à la pratique d’activité physique quotidienne en maison de retraite. Croire qu’il suffit de proposer deux séances de 45 minutes de kinésithérapie pour augmenter la dose d’activité physique hebdomadaire est un leurre. Il y aurait une sorte de paradoxe. En ajoutant deux séances par semaine de kinésithérapie, les personnes se sentent plus actives et s’obligent moins à bouger au quotidien. Par conséquence, la dose moyenne d’activité physique par semaine est inférieure à celle qu’elles pouvaient faire avant le programme.
Référence
Underwood M, Lamb SE, Eldridge S, Sheehan B, Slowther AM, Spencer A, Thorogood M, Atherton N, Bremner SA, Devine A, Diaz-Ordaz K, Ellard DR, Potter R, Spanjers K, Taylor SJ (2013). Exercise for depression in elderly residents of care homes: a cluster-randomised controlled trial. The Lancet, 382, 41-49.
Pour citer cet article du Blog en Santé ©
Ninot G (2014). Réduire les risques de dépression en maison de retraite par la kinésithérapie. Blog en Santé, A16.
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